Vendredi 28 février, H-7 avant la Nuit des Césars
Après avoir éconduit 12 de mes prétendants (oui ça se bouscule au portillon l’hiver à Vichy) hier soir pour ce soir, à cause du froid polaire qui a brutalement succédé au printemps, je me suis dit: «Tiens, si je regardais Canal? Ce soir c’est en clair!»
Et puis vous connaissez mon amour pour le French Movie. Presque autant que le French Kiss. Un amour non sans conséquence, car à cause de cette passion là, d’amis dans la vie, je n’ai pas. Mais qu’importe la réalité, j’ai un nouveau copain imaginaire et nous nous aimons bien.
500 lecteurs mâles tombés plus tard. Ce soir j’ai troqué un vrai faux moment avec lui au profit d’une nuit avec les Césars. Elle est bien loin la Gaule, la vraie.
Donc depuis le début de semaine, je prends mes dispositions pour regarder la nuit des césars ce soir. Comme chaque année depuis que je suis en âge de regarder la télé seule. C’est à dire 12 ans. Et de veiller tard, alors que tout le monde dort déjà, claqué d’une journée de ski, quand ça tombait pendant les vacances de février. Ou d’une journée tout court. Mais autour de moi, les gens semblent s’être réveillés d’un coma prolongé: «Tu peux pas faire ça, Gaël! Roman Polanski est nominé 12 fois et c’est un pédophile. Tu dois boycotter.» Ce à quoi je m’évertue à répondre: «Certainement pas, je suis encore grippée, j’ai le nez bouché, je suis alitée. Je ne vais sûrement pas me priver du spectacle de Florence Foresti en body. Ou des seins de Monica Bellucci, qui arrivent toujours au bon moment (vers 23 heures, quand on commence à décrocher). Je vis peut-être mes dernières heures avec le coronavirus. Je compte bien m’endormir devant des strass, loin du SRAS. Surtout maintenant qu’on est débarrassés du Président Terzian. »
Et oui, je veux le numéro de claquettes de Flo! Bien meilleure présentatrice que Kad, avec qui je ne ferai jamais l’humour. La classe magistrale et la blondeur hitchkockienne de Sandrine Kiberlain. La beauté et la diversité des actrices françaises. Les belles tenues, les garçons nus… Euh… ! Nus sous leurs smokings. Vincent Cassel, Melvil Poupaud, Nicolas Bedos: mon tiercé gagnant, qui par leur simple présence vaudront bien cette soirée sans fin. Je veux les discours larmoyants et émus. Mais pas ceux qui se veulent subversifs, si convenus, trop attendus.
Mon Petit Brief aux stars pour cette énième nuit des Césars
« Mes amis, si vous gagnez ce soir, n’en profitez pas pour nous faire un discours politique. Vous n’êtes pas en position de donner des leçons aux gens. Vous n’y connaissez rien du tout et surtout pas grand chose au monde réel … La plupart d’entre vous avez passé moins de temps à l’école que Greta Thunberg. Donc si vous gagnez, prenez votre césar, remerciez votre agent et votre Dieu, versez votre larmichette et barrez vous. Nous ce qu’on attend ce sont des paillettes. Rien de plus.
Ne profitez pas du moment pour faire entendre une position politique, qui sonnera toujours plus faux qu’authentique. Informés et éveillés que nous sommes, nous n’y voyons là qu’une occasion en or d’émettre de l’image publique. Si vous voulez vous lancer dans une vraie prise de parole politique, vous devrez prendre un minimum de risques. Il y a 30 ans en Iran, le 14 février 1989, l’ayattollah Khomeiny, par un décret religieux mettait à prix la tête de Salman Rushdie. Je repense alors à Isabelle Adjani venue recevoir le César de la meilleure actrice le 4 mars suivant, saisissait l’occasion pour prendre la défense de l’auteur des « Versets Sataniques » dans une lettre ouverte et engagée, faisant fi du scandale. Ou à Marlon Brando qui chargea une Amérindienne de recevoir l’Oscar du meilleur acteur pour le Parrain à sa place, donnant ainsi la parole à ceux qui ne l’avaient pas. Là c’était subversif, courageux et émouvant.
Un César comme un Oscar sont des occasions rares et peut être uniques de faire entendre sa voix en un instant aux 4 coins du globe.
J’apprécie le fait que certaines stars en profitent pour parler des autres plutôt que d’eux mêmes. Ça change un peu et c’est parfois intéressant. Parfois même, ces discours ont un impact véritable, notamment au moment de l’affaire Weinstein et du mouvement «Me Too», lorsque Meryl Streep avait pris la parole aux Golden Globes puis aux Oscars, rappelant que la violence engendrait la violence. Ou lorsque Joaquin Phoenix et Leonardo DiCaprio ont livré de brefs, mais vibrants plaidoyers principalement centrés sur l’environnement et les problèmes résultants du changement climatique dans leurs discours de remerciements aux Oscars.
Enfin, malgré tout, ce que je préfère c’est rire: Blanche Gardin qui ose le sketch aux Césars 2018 sur le viol et les actrices qui couchent pour avoir un rôle. Ou ses amusants discours lorsqu’elle reçoit ses Molières en 2018 et 2019. Et enfin, j’aime l’émotion: Les larmes de Charlotte Gainsbourg lorsqu’on lui remet le César du meilleur jeune espoir pour «L’Effrontée» au tout début de sa carrière. Les poils.
C’est frais, émouvant, désarmant, spontané. Et c’est du cinéma, du vrai.
Voilà, ça va être l’heure du tapis rouge. J’attends que Lutz fasse son Alex par sa présence et que Doria Tillier nous claque un look Jennifer et le discours de Steve Jobs. J’ai du pop corn et mes lunettes pour en prendre plein les mirettes.